La sorcellerie ou l’art d’interroger et d’influer le sort est une pratique des plus anciennes. Tour à tour respectés ou persécutés, les sorciers et sorcières sont marqués par une histoire tumultueuse. Si le terme est galvaudé, les représentations iconographiques des sorcières au nez crochu, volant à califourchon sur un balai ne sauraient rendre justice à la pluralité historique de celles et ceux que l’on nomma sorciers.
Sorcellerie blanche, magie noire : quelles différences ?
La distinction entre sorcellerie blanche et magie noire s’effectue dès la fin du Moyen-Âge dans les années 1450. Si la magie blanche comme la magie noire sont supposément originaires du culte primitif et ritualiste des esprits, la pratique de ces deux types de magie s’opère de manière diamétralement opposée. Tandis que la magie blanche tend à être au plus près des esprits et à jouir de ses pouvoirs à des fins altruistes et bienveillantes, la magie noire s’intéresse à l’invocation des esprits pour en retirer un bénéfice égoïste. La magie noire est affiliée aux maléfices, malédictions et au Diable. La magie blanche et la magie noire se distinguent donc d’un point de vue de l’intention morale. Cependant, ce ne sont pas les seules formes de sorcellerie pratiquées. On parle également de magie rouge attribuée à l’amour et au plaisir charnel, la magie verte considérant la nature et la magie bleue associée aux sorts de protection. Grégoire l’Alchimiste lui aussi devra composer avec la magie et toutes ses élucubrations morales tout au long de sa quête pour retrouver la Pierre Philosophale.
Les sorcières de Salem : une traque sans merci
La chasse aux sorcières qui s’est tenue à Salem Village aux États-Unis entre 1692 et 1693 est un massacre d’une violence inouïe. Cette traque trouve ainsi son début ; deux jeunes filles Betty Parris et Abigail Williams respectivement âgées de 9 et 11 ans, respectivement fille et nièce du révérend Samuel Parris. Après une séance de divination prodiguée par Tituba, une servante de la maison Parris, les jeunes filles commencent à adopter un comportement suspect : hallucinations, convulsions ou encore conversations dans un dialecte inconnu. Petit à petit d’autres filles du village sont atteintes du même mal. Conscientes que leurs actes sont contraires aux valeurs religieuses puritaines, les filles se décident à dénoncer les sorcières. La communauté qui ne dispose pas de réel gouvernement, n’hésitera pas à prêter foi aux dires des jeunes filles. Dix-neuf personnes, dont cinq hommes, sont arrêtées et pendues pour sorcellerie. Un crime odieux qui meurtrira tant la communauté que les terres et l’économie de Salem Village. Les villageois menacés s’enfuient, les terres sont laissées à l’abandon et les bêtes manquent de soins.
Sorcellerie moderne : vers un adoubement de la sorcière de Salem ?
À l’ère du numérique, la sorcellerie moderne trouve un nouveau souffle. L’accès généralisé à l’information en ligne permet une vulgarisation massive des pratiques de sorcellerie. Que l’on s’intéresse à l’alchimie ou à l’astrologie, au tarot ou aux vertus des cristaux, chaque sorcière en devenir peut trouver les connaissances et le matériel adéquat pour opérer des rituels magiques à la maison. Mais la sorcière prend également une dimension symbolique. Elle voit un jour nouveau dans les mouvances féministes actuelles. Véritable emblème de l’empouvoirement de la femme puissante et maîtresse de sa destinée, la sorcellerie moderne s’habille des couleurs du féminisme. Elle donne d’ailleurs son nom à l’ouvrage féministe de Mona Chollet Sorcières, la puissance invaincue des femmes. La sorcellerie rapporte également à une notion de sororité, comme le coven des sorcières de Salem autrefois, la sorcellerie moderne rend compte d’une volonté de se retrouver au sein d’un groupe afin de se réaliser et de partager des valeurs communautaires.
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